Episode III - Signal transitoire

L'agent Lemm construisait patiemment la carte universelle, astre par astre, en se concentrant sur les zones qui l'avaient marqué au fil de ses explorations.

Alors qu'il naviguait, comme souvent, dans la galaxie Electonique, lui revint en mémoire un astéroïde à l'éclat incroyable et au nom prémonitoire, The Signal. Il y a dix ans de cela, il avait été le centre de l'attention pendant des semaines grâce à l'écho offert par une compilation externe l'utilisant en fond sonore.

L'archiviste l'avait découvert à cette occasion, avait creusé le reste des astéroïdes générés par cet astre du nom de BertycoX, accessible notamment sur la plate-forme Jamendo. Il y avait trouvé quelques perles mémorables, dont une aux vertus hypnotiques et une qui resta longtemps parmi ses trajets préférés. Et d'autres de bonne facture, aucune ne faisant vraiment tâche dans le paysage. Pas un nombre démentiel d'astéroïdes générés, mais suffisamment pour laisser présager du bon pour l'avenir.

Dix ans plus tard, en repassant dans les environs, plus aucune trace d'activité sur Jamendo ni Facebook. Ni récente, ni même passé. Comme si tout avait disparu, supprimé ? Seul restait une page Youtube ouverte contenant quelques morceaux. L'archiviste fronça les sourcils, surpris de cette disparition brutale depuis 2011. Arrêt volontaire pour retourner à sa quiétude ? Drame muet ?

Il décida de pousser les recherches pour trouver un indice, une clé de compréhension. Et il finit par trouver, au milieu des ondes désertées, la trace d'une communication portant la signature de BertycoX. Pas moyen d'être sûr qu'il ne s'agit pas d'une usurpation, mais il partit du principe qu'il s'agissait du vrai, les autres informations disponibles plaidant pour cette hypothèse...

Ce qui laisserait penser que l'étoile, bien qu'éteinte, ne s'était pas effondrée. En concentrant ses recherches sur ce faisceau d'indices, il finit par trouver une confirmation de cette piste : un signal émis quelques mois à peine auparavant, la réponse finale.

L'extinction de l'étoile semblait donc définitive. Rien de dramatique, juste l'évolution naturelle des choses. S'il ressentit un pincement au cœur en réalisant que cette étoile à la touche unique ne générerait sans doute plus rien, il était soulagé d'avoir obtenu un bout de réponse à ses interrogations.

Restait une question métaphysique plus profonde à résoudre : fallait-il référencer des oeuvres supprimées par leur auteur, même simplement leur nom ? Dans le cas du moment la question ne se posait qu'à moitié, une partie des oeuvres restant accessible dans le giron de leur créateur, mais pour des cas d’œuvres qu'un artiste ne trouverait plus à la hauteur, la question se posait. Il sembla à l'archiviste que le respect de la volonté du créateur devait primer, mais c'est le cœur amer que les archivistes allaient s'y résoudre.